Nous sommes sortis de l’aéroport international de Taoyuan, situé à une quarantaine de kilomètres de Taipei, en un temps record, aiguillés par un personnel compétent et efficace. Taxi, hôtel, une bonne nuit de sommeil : nous sommes prêts à partir explorer ce pays qui nous intrigue.
Taïwan a la même superficie que la Suisse et est traversée du nord au sud par une chaîne de montagnes qui culminent à presque 4000 mètres au dessus de la mer, plus haut que le Mont Fuji. Il y a : à l’ouest, une plaine qui occupe un petit tier de l’île ; à l’est, une côte escarpée ; au centre, des montagnes inhabitées où les routes sont quasi inexistantes. Les cyclotouristes choisissent souvent de faire le tour de l’île, soit entre 1000 et 1200 km. C’est un itinéraire classique à vélo, d’autant plus qu’il a été balisé il y a quelques années et qu’il est bien documenté – cherchez « Route numéro 1, Taïwan ». Plutôt que de pédaler le nez dans le guidon pour parvenir à finir la boucle, nous préférons prendre notre temps, faire des détours, et finir en train. On nous a répété que la côte est de l’île est beaucoup plus agréable et sauvage que la partie ouest, qui concentre toutes les grosses villes, les usines, les camions, la pollution et la majeure partie des 33 millions d’habitants de Taïwan. Nous éviterons donc autant que possible cette immense zone urbaine pour passer le plus de temps possible sur la côte est, quite à n’avoir qu’une vue très biaisée et un peu idyllique de Taïwan.
Depuis l’aéroport, il nous faut traverser l’agglomération de Taipei pour rejoindre la côte nord. Nous gardons la visite de la capitale pour la fin du voyage et évitons le centre-ville pour l’instant. Les premiers kilomètres nous mettent tout de suite dans une ambiance très vivante : bruit, scooters, traffic routier chaotique, marchands de rue, effluves de soupes ou d’égouts… C’est un peu un choc après la rigueur et l’organisation japonaise mais nous trouvons assez rapidement nos repères. Un réseau de pistes cyclables nous permet de contourner les grattes-ciel de Taipei sans perdre de temps et d’arriver à Tamsui juste avant la pluie. Là, notre première vraie halte confirme nos impressions initiale : fini le calme du Japon, nous sommes bien en Asie du Sud-Est ! Pour rejoindre notre hôtel, nous nous faufilons dans des micro-ruelles au milieu des scooters omniprésents. Le matin, le marché a envahi les quelques mètres de libres et les étalages de fruits, légumes, poissons et viandes nous laissent à peine de quoi passer avec nos tandems.
Nous longeons la côte pour rejoindre la pointe nord de l’île. L’itinéraire fléché pour les vélos emprunte une grosse route nationale avec une circulation assez intense. La route est très large avec une voie réservée aux deux roues et nous nous sentons relativement en sécurité car la conduite des Taiwanais est malgré tout tranquille et respectueuse. Mais cela ne nous protège ni du bruit ni de la pollution…
Heureusement, le soleil est de la partie et les attractions sont nombreuses. Ici, nous passons près d’un temple taoïste aux dragons multicolores. Plus loin, les vagues du Pacifique ont sculpté la roche volcanique en des formations géologiques rappelant des champignons géants. Sur une plage de sable, des surfeurs locaux essaient de dompter ces vagues. Et nous sommes constamment encouragés par une ribambelles de pouces levés ou de joyeux « jiāyóu » qui veut dire littéralement « rajoute de l’huile » mais qui est apparemment une expression très courante pour dire « allez allez ! ». Dans le doute, nous avons quand même graissé les chaînes des vélos 😉.
Nous traversons plusieurs villages s’étendant le long de la route 1. En quête de petites routes plus tranquilles, nous tombons plusieurs fois sur le retour de la pêche. Alors que nous regardons l’un de ces bateaux qui débarque ses poissons, un guarde-côtes s’approche de nous pour nous faire un sourire et nous expliquer, dans un anglais rudimentaire et quelques signes de la main, que son poste est tout près d’ici et que nous pouvons nous y arrêter si nous avons besoin d’aide. Aujourd’hui tout va très bien pour nous, mais cela fait du bien de savoir que nous pourrons compter sur l’amabilité des gens en uniformes en cas d’imprévus !
Nous arrivons à Keelung, une grande ville portuaire très animée qui détient le record annuel de jours de pluie (plus de 300 !). Mais nous avons un beau soleil et nous sommes plus marqués par les rues étroites et la circulation infernale. Les feux de circulation sont pour autant bien respectés. Alors que nous patientons à un grand croisement entourés d’une vingtaine de scooters, l’une des conductrices sort d’un pannier deux petits sacs en plastiques qu’elle tend aux enfants. Nous avons à peine le temps de la remercier que le flot de deux-roues redémarre. Cette généreuse inconnue vient de nous offrir deux paniers repas et nous avons à peine pu échanger quelques mots. Merci à vous gentille dame, nous nous sommes régalés !
La route 1 s’éloigne du bord de mer et nos mollets redécouvrent le plaisir des petites côtes et des longues descentes. Nos tandems ne passent pas inaperçus et nous avons l’impression d’être des stars photographiées à chaque pause. A l’heure du goûter, deux cyclistes s’arrêtent pour bavarder et nous conseiller une alternative à la route 1. Suivant leur recommandation, nous pédalons sur une petite route déserte au milieu d’une végétation luxuriante jusqu’à un kiosque au bord de la mer pour bivouaquer. Le soir, des promeneurs s’enthousiasment devant notre projet de campement et nous ramènent deux énormes pomelos de leur jardin. Cette journée a été riche en émotions et en rencontres, certes brèves, mais qui nous ont beaucoup touchés.
Nous réalisons vite que le fameux itinéraire cycliste numéro 1 reste collé à la route nationale qui relie les villes de la côte est à Taipei. Nous cherchons maintenant à nous en éloigner le plus possible, même si la géographie escarpée limite parfois les options. Nous traversons paisiblement une grande plaine rizicole, un peu brunâtre après les moissons, puis dénichons une piste cyclable fréquentée le dimanche après-midi par les promeneurs jusqu’à Dongshan. Plus au sud, le relief ne laisse place qu’à une seule route, la Suhua Highway, connue autant pour ses vues spectaculaires sur le Pacifique que pour ses nombreux tunnels étroits. La plupart des cyclistes empruntent le train pour éviter cette section dangereuse. Récemment, de nouveaux tunnels ont été ouverts, déviant l’essentiel du trafic sur certains tronçons. Nous nous embarquons alors sur cette route vertigineuse pour profiter des vingt premiers kilomètres libérés des moteurs. Au bout d’une centaine de mètres, un panneau nous met en garde contre les singes et autres animaux sauvages. Les filles sont à l’affût ! Et quelques kilomètres plus tard, c’est toute une troupe de macaques qui nous offrent un beau spectacle, sautant de branches en branches pour traverser la route. Dynamisés par cette rencontre, nous finissons la grimpette pour admirer l’océan 400m en dessous de nous.
Arrivés à Dong’ao nous prenons le train jusqu’à Xincheng pour éviter une section de route nationale particulièrement dangereuse et sans alternatives. Nous sommes aidés par un sympathique contrôleur qui nous guide jusqu’au wagon vélo : monter dans le train avec nos vélos chargés se passe sans aucun problème.
Xincheng est la porte d’entrée du parc national de Taroko dans les montagnes du centre de Taïwan et nous avons très envie de faire un petit détour dans la jungle. La route qui y mène est aussi réputée pour ses paysages, donc nous fonçons sans hésitation. Dès les premiers kilomètres, la vallée se resserre, les montagnes s’élancent à plus de 2000m, et les parois de marbre (!) sont de plus en plus verticales jusqu’à se transformer en des gorges profondes miraculeuses couvertes de lianes et de fougères. L’homme a creusé dans cet environnement hostile de nombreux tunnels et galeries qui permettent à la route de pénétrer dans cette jungle. Au sein du parc, un petit camping est mis à disposition gratuitement – parfait pour un bivouac au calme. Hormis cette route, la nature est sinon très sauvage et peu domestiquée. Les récents typhons ont de plus provoqué des éboulements, causant la fermeture d’une partie des quelques sentiers de randonnée. Ce n’est guère étonnant vu le relief ! Les filles ont très envie d’explorer la jungle comme de vraies aventurières. Heureusement, l’un des chemins derrière le camping est resté ouvert, même s’il est réputé difficile. Il faut se faufiler sous des arbres, escalader des rochers sécurisés par des cordes, grimper à flanc de falaise – c’est l’aventure !
La route du parc continue vers l’ouest avec un col à 2600m. Ce n’est pas à notre programme et nous faisons demi-tour vers la côte pour redescendre vers Hualien, la plus grosse ville de l’Est avec 250 mille habitants.
Il fait chaud et nous nous arrêtons en bord de mer pour boire de l’eau de coco quand nous sommes surpris par les rugissements assourdissants d’une poignée d’avions de chasse qui décollent coup sur coup juste au dessus de nos têtes. Nous nous trouvons en fait juste à côté d’une base aérienne. Quelqu’un vient nous voir, ayant sans doute repéré nos drapeaux : « ce sont des avions français ! Rafale ! ». Puis, avec un grand sourire, « Ils partent repousser les Chinois ! ».
Au même moment, par un concours de circonstances incroyable, nous retrouvons notre ami Taïwanais Li Chih-Chien (aka Loby), que nous avions rencontré au Japon un mois auparavant sur l’île de Shikoku alors qu’il achevait de boucler le tour du Japon à vélo en solitaire. Plus exactement, c’est lui qui nous a retrouvés grâce à notre trace GPS sur Polarsteps, après nous avoir reconnus sur une photo qu’une automobiliste a postée sur Facebook ! Après nous avoir épatés au Japon par sa ténacité, Loby nous comble par sa gentillesse et son hospitalité. Par les soins de Loby et de sa femme Mayo, nous nous retrouvons en quelques instants très confortablement installés dans l’hôtel de son ami Aga puis invités à dîner au restaurant. On nous y fait découvrir la cuisine indigène des peuples autochtones de Taïwan et nous apprenons énormément sur l’histoire et la culture locale. La nourriture est en plus délicieuse, ce qui ne gâche rien à cette soirée très conviviale. Nous avons aussi droit à une visite guidée du « night market » de Hualien, marché nocturne très animé avec une abondance de cuisine de rue, de performances et de jeux.
Le lendemain, nos hôtes taïwanais nous accompagnent à vélo sur une quinzaine de kilomètres, Aga profitant de l’occasion pour nous faire découvrir les plus beaux points de vue et partager ses connaissances sur la géographie du pays. Merci Aga, Lobby et Mayo !
On parle plusieurs langues à Taïwan, mais tout le monde parle le mandarin. Cela ne nous aide pas beaucoup, certes, car nos compétences se limitent aux politesses d’usage et qu’il est très difficile de faire des progrès. Nous pouvons quand même mettre à profit les très maigres connaissances acquises dans la lecture du japonais pour deviner le sens de certains pictogrammes. Les Japonais avaient emprunté leurs fameux kanjis aux Chinois il y a très longtemps (kanji veut littéralement dire “caractère chinois”), bien avant que le Parti communiste ne lance une vaste réforme visant à simplifier l’écriture du mandarin. Taïwan a échappé à cette réforme et continue donc d’utiliser l’écriture traditionnelle, donc proche des kanjis japonais.
Parmi les autres langues parlées à Taïwan, on trouve le hakka et le minnan, appelé tout simplement taïwanais. On nous a dit que ce dernier a été fortement influencé par le japonais lors des cinquante ans d’occupation nippone. Difficile pour nous d’en juger tant nous ne comprenons rien, mais nous voyons quand même une similarité avec le Japon quand nous observons les Taïwanais pianoter sur leurs téléphones, par exemple pour nous traduire des conseils ou des questions en anglais. Ils utilisent en effet souvent sur leur clavier le bopomofo, un système syllabaire utilisé pour transcrire le mandarin qui ressemble fortement aux kanas japonais. C’est un infime détail, pourtant il nous rappelle à la fois les liens anciens qui unissent les peuples d’Asie et la richesse de leur diversité culturelle aujourd’hui. L’itinéraire de notre voyage, tracé sur une carte, paraît dérisoire. Et pourtant, ce que nous avons vu jusqu’à maintenant a été d’une diversité incroyable.
La route le long de la côte est est plutôt plate et facile, mais il y a quand même quelques montées et celles ci peuvent parfois sembler longues quand le soleil cogne fort. Heureusement, il est rare de passer beaucoup de temps sans que nous ne soyons émerveillés par quelque chose d’extraordinaire. Parfois c’est une plante étrange, parfois un gros oiseau aux couleurs vives. Ou bien ce sont des branches qui se mettent à bouger avec force sur le bord de la route. Les macaques de Taïwan sont nombreux et se déplacent souvent en groupe, et les enfants nous forçant à nous arrêter pour les regarder caracoler dans les arbres. Leur cri singulier est aussi bien identifiable et un bon indice pour les repérer dans les arbres. Sur certaines petites routes tranquilles, les rencontres avec les macaques sont plus fréquentes que celles avec les voitures !
Il y a aussi les fruits en vente au bord des routes, en libre service, avec une petite boîte en métal pour y glisser un billet. À point nommé pour l’heure de déjeuner, nous nous servons ainsi généreusement en délicieux petits pains de pâte de riz cuits à la vapeur et en différents laits de soja de fabrication artisanale. Là encore, c’est un système basé sur la confiance et nous laissons quelques billets dans une boîte.
Taïwan est à la jonction entre deux plaques tectoniques : la plaque eurasienne et la plaque des Philippines. Les mouvements géologiques ont ouvert au milieu des montagnes une étroite vallée fertile, la East Rift Valley sur plus de 100 kilomètres. C’est une région rurale réputée pour sa culture indigène et son agriculture. Pour la rejoindre, nous empruntons une route minuscule à flanc de falaise dans la jungle. L’ambiance est équatoriale sous la bruine chaude. Dans ces coins reculés, l’entrée d’un petit village indigène s’annonce avec son totem et ses jardins, des arbres fruitiers et des buffles en bord de route. Après une dernière montée dans les nuages, nous descendons prudemment vers la plaine. Un récent typhon a provoqué des éboulements mais heureusement la route est très bien entretenue. Nous arrivons dans la bourgade de Ruisui où une charmante petite chambre chez l’habitant nous attend pour célébrer l’anniversaire d’Héloïse. Elle découvre avec émerveillement une chambre peinte aux couleurs de Snoopy. Après avoir soufflé ses bougies et dévoré un généreux « hot pot », la fondue taïwanaise 😀, elle s’endort avec le sourire de ses 6 ans !
Au sud de Ruisui, nous passons le tropique du Cancer et nous pédalons dorénavant sous les tropiques. La région est très fertile avec entre autres des champs d’ananas, des vergers d’agrumes et autres fruits tropicaux, du maraîchage et de belles rizières. Cette région a des allures de paradis terrestre, si l’on oublie un instant les calamités qui la ravagent régulièrement. Ainsi, beaucoup de routes de la région ont été endommagées par un récent tremblement de terre. Les travaux de réaménagement sont presque partout terminés et les routes sont excellentes, sauf pour la piste cyclable entre Yuli et Fuli, qui est ainsi encore fermée. Ailleurs, les traces du passage d’un typhon deux mois plus tôt sont encore visibles.
Nous empruntons la route numéro 23 qui relie la vallée du rift à la côte est en serpentant entre les montagnes. Nous passons progressivement d’un paysage de cultures vivrières à une forêt tropicale. Les voitures sont rares, le revêtement de la route est excellent et il n’y a pas d’autres bruits que ceux de la forêt. Une symphonie de cris de singes, de chants d’oiseaux, de bruits d’insectes et de sons mystérieux nous accompagne. L’ambiance est à la fois reposante, sereine et un peu magique. Nous plantons notre tente sur une belle pelouse impeccablement plate, propre et dégagée, complètement improbable dans un endroit pareil, puis nous endormons en savourant la chance que nous avons de vivre des moments aussi exquis.
De retour sur la côte, les vents dominants nous poussent généreusement vers le sud le long d’une route plate et large avec un revêtement impeccable. Nous nous sentons comme guidés par une main invisible qui veut nous faire visiter Taïwan ! Mais les belles plages désertes bordées de cocotiers demandent aussi à se qu’on s’y attarde, donc nous faisons parfois peu de kilomètres et beaucoup de châteaux de sable 😀. La baignade est par contre clairement déconseillée en cette saison, à cause des grosses vagues et des courants dangereux.
Nous passons deux nuits à Taitung, petite ville dans la partie sud de l’île, afin de passer une journée sans toucher aux vélos. C’est l’occasion pour les enfants de faire un peu plus d’école et de passer une bonne demie journée à jouer dans une grande aire de jeux. Les interactions avec les autres enfants se passent très bien, grâce au langage des signes, quelques bribes d’anglais, et l’universalité des codes sociaux en vigueur dans les groupes d’enfants.
La cuisine taïwanaise est variée, agréable et bon marché. Trouver à manger n’est pas un problème sur les routes. Il a des vendeurs de rue un peu partout dans les villes, de nombreux restaurants, et toujours les “Seven-Eleven” et “FamilyMart”, ces commerces de proximité qui ne nous ont pas lâchés depuis la Corée.
Le petit déjeuner est un repas important ici et des restaurants spécialisés ouvrent très tôt pour servir diverses crêpes, toasts et sandwichs avec du thé au lait et du lait de soja – parfait avant de pédaler. Le riz et les nouilles servent de base aux repas et s’accompagnent de nombreux légumes, de viande ou de fruits de mer, le plus souvent sautés dans des sauces douces ou épicées. Le tofu et les œufs sont aussi très présents. Il nous semble que les Taiwanais ont gardé le meilleur de la cuisine chinoise avec des influences japonaises et vietnamiennes – 😋.
En plus des légumes variés, de nombreux fruits exotiques agrémentent nos journées : ananas, bananes, noix de coco, fruits du dragon, goyaves, papayes, fruits de la passion, agrumes variés et autres fruits inconnus. Et il y a aussi les desserts, autant inhabituels que délicieux. Les glaces ont des arômes de riz violet, haricots rouges, taro ou cacahouète. Le tofu frais ou la glace pilée se dégustent avec du sirop de cane et divers accompagnements gélatineux à base de tapioca ou taro (une racines tropicales). Les arômes sont très doux et le jeu des textures intéressant.
La star des spécialités taïwanaises est avant tout le « bubble tea ». Dans sa version originale, il se compose de thé noir sucré et de lait auxquels sont ajoutés des glaçons et des boules de tapioca. Servi dans d’énormes gobelets, on aspire le tout avec une grosse paille ce qui fait remonter les « bubble » avec leur texture si particulière. C’est autant un repas qu’une boisson ! On trouve en ville de très nombreuses échoppes qui proposent différentes variations de cette boisson et qui permettent de personnaliser la quantité de glace et de sucre. Très populaire à Taïwan, le bubble tea s’est exporté sur tous les continents et il a beaucoup plu aux filles pour le goûter.
Après cette pause d’une journée à Taitung, nous repartons bien reposés sur nos tandems, enchaînants rapidement les kilomètres. Au sud de Taimali, l’ambiance change et prend clairement des airs d’île du Pacifique. Il nous faut d’abord parcourir une quarantaine de kilomètres sur la très fréquentée route numéro 9. Cette section est surnommée la Hawaï Highway probablement parce que, justement, on se croirait à Hawaï, coincés entre les montagnes luxuriantes et les rouleaux de l’océan. Cette deux fois deux voies est heureusement très large et toujours munie de cette bande de deux mètres de large réservée aux deux-roues, gage de sécurité à défaut de sérénité. Poussés par le vent du nord et filant à toute vitesse, nous ne sommes finalement pas dérangés très longtemps par les nombreux gros camions qui sillonnent la côte et rejoignons sans problème le conté du Pingtung, au sud de l’île.
Il faut certainement beaucoup plus de courage aux cyclistes qui remontent vers le Nord et affrontent les rafales. Nous croisons en effet cet après-midi là un groupe de 200 cyclistes sur des vélos de route encadrés par une moto ouvreuse, des guides et des camions de support. Ils font partie de tours organisés qui proposent des circuits de cyclotourisme sur la route 1. Certains viennent de Hong Kong, d’autres de Taïwan, et tous nous saluent avec un pouce vers le haut.
Nous croisons aussi plusieurs marcheurs, dont en particulier notre ami Aga rencontré à Hualien, qui font le tour de l’île à pied. Certains portent un gros sac à dos, d’autres tirent une petite charrette. Certains sont seuls, d’autres en petits groupes. Tous sont très sympathiques 😀. Ils ont du courage et de la ténacité pour marcher ainsi le long des routes : il y a peu de chemins alternatifs à la route principale et certaines sections doivent être assourdissantes.
L’influence chinoise est maintenant pratiquement inexistante, ou du moins très peu visible. Dans ce recoin de l’île, ce sont les arts et la culture des peuples indigènes qui ont le droit de s’exprimer. Nous apercevons beaucoup de constructions décorées de peintures, sculptures ou autres œuvres d’art ainsi qu’une grande variété de plantes et de fleurs. La nature est puissante et les villages paraissent cependant très pauvres, si bien que maisons et jardins semblent parfois se faire dévorer par la végétation.
Les nouvelles de France et de Suisse nous parlent d’un froid hivernal et nous montrent des paysages recouverts de neige. Ici seuls quelques sapins en plastique et décorations diverses commencent à trahir l’approche de Noël. Ainsi le 1er décembre, pour se distraire durant une longue montée, les filles se mettent à chanter des chansons de l’avent à tue-tête en suisse-allemand, encouragées par les singes qui font des cabrioles dans les branchages. C’est une ambiance bien différente et si l’hiver nous manquera peut-être un peu, nous n’allons quand même pas nous plaindre ☺️.
Nous dénichons dans le petit village de Mudan grâce à Google Maps un camping autant extraordinaire qu’improbable. Caché derrière un portail sans inscription ni sonnette se trouve un grand jardin méticuleusement entretenu. Les chats et les papillons batifolent entre les plantes et les fleurs multicolores pendant qu’une dame adorable nous fait fièrement visiter le camping et sa ferme attenante. Il y a des douches, des toilettes, des chèvres, du miel et du café. C’est absolument parfait et nous apprécions beaucoup cet oasis de confort et d’esthétisme au milieu de la forêt tropicale.
La pointe sud de l’île est particulièrement sauvage, avec des reliefs relativement doux, composés de forêts tropicales ou de côtes abruptes et très ventées. Une fois le cap sud atteint, il nous faut remonter vers le nord et faire avec des vents moins favorables. Heureusement la côte sud-ouest est un peu protégée par la dorsale montagneuse qui bloque la mousson d’est et les éléments se calment un peu. Nous pouvons ainsi profiter des plages, d’autant plus aménagées que nous nous rapprochons doucement des zones urbaines de la côte ouest. C’est la basse saison, il y a peu de monde et il n’est pas désagréable d’avoir des douches pour se rincer après avoir joué dans le sable.
Une bonne partie de la côte, entre mer et montagnes, est occupée par des cultures semi intensives qui sont spécialisées par région. Tantôt nous traversons des vergers de pommes-cannelles pendant des dizaines de kilomètres, les bords de route jalonnés de boutiques vendant uniquement des caisses de pommes-cannelles, puis soudain tout change et ce sont des plantations de fruits du dragon, ou de bananes, ou d’ananas, ou de mangues, ou d’onions… À chaque fois, nous goûtons, profitant des boutiques et vendeurs ambulants. Quand ce n’est plus la saison, comme pour les mangues, les fruits sont congelés ou séchés. Et à chaque fois, sauf pour les onions 😀, nous nous régalons les papilles !
A plusieurs reprises le long de la côte, notamment dans les grands estuaires, nous traversons un nombre impressionnant de fermes piscicoles. Dans ces grands bassins peu profonds sont élevés de manière industrielle une grande partie des crevettes et poissons consommés sur l’île. Une partie finit aussi probablement dans vos assiettes 😉. Des flotteurs munis de roues à aubes motorisées viennent fouetter la surface de l’eau pour alimenter les poissons en oxygène, tandis que des silos déversent de la nourriture à une cadence bien précise. Bon appétit…
Nous remontons ainsi vers le nord jusqu’à Dongg’an, point de départ d’une excursion sur la petite île de Xiaoliuqiu. A peine débarqués du ferry, nous louons des masques et des tubas et sautons tous dans l’eau – sauf Héloïse bien sûr, qui préfère y tremper juste le bout de son nez… Nous sommes littéralement plongés dans un autre univers, plein de poissons multicolores et de tortues marines. C’est une expérience inoubliable, comme une cerise sur le gâteau pour conclure ces 3 semaines de vélo ! Les enfants sont absolument enchantées d’avoir pu voir « en vrai » des animaux qu’elles croyaient réservés aux livres et aux aquariums.
Nous remontons maintenant en train jusqu’à Taipei avant de prendre l’avion dans quelques jours pour Ho Chi Minh City, au Vietnam.
Merci pour ce merveilleux récit ou les journées “bonheur” abondent !
On comprend que ce n’est pas toujours facile de se déplacer à vélo. Votre perspicacité est bien récompensée par toutes ces chaleureuses rencontres, ces découvertes de nature paradisiaque. Quelle riche expérience de vie pour les enfants !
C’est une réserve de belles images pour faire de beaux rêves !
Héloïse a eu un anniversaire mémorable !
Avez-vous ressenti un tremblement de terre ?
Que le voyage continue aussi bien au Vietnam.
Grosses bises de Mamie F
Nous n’avons ressenti aucun tremblement de terre pour le moment, ni à Taïwan ni au Japon. Et nous n’avons croisé la route d’aucun typhon. La météo nous a gâtés pour le moment.
Tout d’abord pour prolonger l’événement bon anniversaire Héloïse.
Merci beaucoup de partager votre voyage à vélo et en famille .
Une autre vision de la vie, de belles rencontres, de belles découvertes qui resteront à jamais gravées dans votre mémoire.
A la prochaine
😘
Jacky
Merci bien ! On passe notre temps entourés de gens sympathiques, donc la vie est belle 🤩. On apprécie, car tout le monde n’a malheureusement pas cette chance…
Bises et à la prochaine 😘
Dear Friends,
Thank you so much for another great post. Until now I thought of Taiwan as an industrialized country and a world hub for semiconductors but now I learned that there is so much more. Once more I am so happy to read about the many signs of kindness and welcoming gestures that you are experiencing wherever you go. I enjoy a lot how you describe the little details of the people’s daily life. I can also see in the pictures that the monkeys are also used to the ubiquitous food self-services :-)). What a great experience for you all! And the best is that you are nicely describing it in these post. In a few years it will still be a joy reading these entries.
Travel safely and continue enjoying your trip.
Abrazos de vuestro amigo the caveman 😉
Hello dear Pedro, each country and each person is indeed always so much more than a few clichés. We actually didn’t go anywhere near the big semiconductor factories, so we now have our own completely biased view of Taiwan 😅. We will leave tomorrow and I regret to inform you that I didn’t manage to get any secret recipe for your ginger shots 🫣
Take care and good luck with the upcoming rocket launch 🚀😉
在日本騎單車旅行認識你們一家而且你們又來到台灣旅行我們又相聚是很奇妙的緣份,明天你們一家要前往越南繼續你們的旅行,希望你們會喜歡台灣這個地方,有機會歡迎你們一家再來台灣玩,在這祝福你們一家平安順遂有緣份我們會再碰面的 !
您和您可愛的妻子對我們非常友善,我們對您感激不盡!我們很喜歡在台灣旅行,並且非常感謝每個人的慷慨和熱情。 🙏 我們會鼓勵我們的朋友和家人再次造訪台灣!祝您和您的家人身體健康、幸福快樂(祝您新西蘭之旅愉快!😀)
在日本騎單車旅行認識你們一家而且你們又來到台灣旅行我們又碰面這是很奇妙的緣份,明天你們將前往越南繼續你們的旅行。希望你們會喜歡台灣這個地方,有機會歡迎你們再來台灣玩,在這祝福你們一家平安順遂
Un grand merci pour cette découverte de Taiwan grâce au récit de vos découvertes des paysages, de la gastronomie et des belles rencontres qui jalonnent votre périple. Aucun doute que cette aventure à vélo laissera de merveilleux souvenirs à toute la famille, une chance que vous avez su saisir et qui d’après vos commentaires apporte du bonheur aux filles. Bravo et très bonne continuation.
PS: ici c’est l’hiver avec énormément de pluie qui rend les sorties vélo fraiches et humides
Magnifique et captivant récit. Quelle diversité ! Chaque jour, chaque paysage, chaque rencontre est différente. On sens nettement la bascule du côté tropical du monde. Et vous semblez bénéficier d’ une bonne étoile en n’ ayant aucun gros soucis, ni physique, ni météorologique, ni mécanique, ce qui est top. Du pur bonheur à chaque coup de pédale.
Un gros bisous à tous
Lise
Encore une magnifique aventure et un très beau récit, qui change l’idée que l’on se fait de ce petit pays. Merci pour ce partage, et profitez bien de ces longues vacances.
En vous souhaitant bon vent pour la suite de l’aventure,
Aubin